Le Brexit, ce processus de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) après plus de 40 ans de coopération politique et économique, a des répercussions considérables sur le droit européen. Cet article vise à analyser les principales implications et les défis que représente cette situation inédite pour les acteurs juridiques, tant britanniques qu’européens.
Le retrait d’un État membre : une première dans l’histoire de l’UE
Le Brexit constitue une rupture historique et juridique sans précédent dans l’histoire de l’intégration européenne. En effet, aucun État membre n’avait jusqu’alors fait usage de la possibilité de se retirer volontairement de l’UE, prévue à l’article 50 du Traité sur l’Union européenne (TUE). Ce texte établit les procédures pour la négociation et la conclusion d’un accord de retrait entre l’État concerné et les autres membres.
L’accord final, signé en janvier 2020, a été marqué par d’intenses négociations et des rebondissements multiples, témoignant des difficultés inhérentes à la mise en œuvre concrète du principe d’autodétermination des peuples dans le contexte européen complexe.
La fin de la primauté du droit européen au Royaume-Uni
Le principal effet juridique du Brexit est la fin de l’application directe et de la primauté du droit européen sur le territoire britannique. Cela signifie que les traités européens, les règlements et les directives ne sont plus une source de droit au Royaume-Uni, et que la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) n’a plus d’autorité contraignante pour les tribunaux britanniques.
Cependant, pour éviter un vide juridique et assurer une continuité législative, le Royaume-Uni a adopté le European Union (Withdrawal) Act en 2018. Ce texte prévoit la transposition en droit interne des normes européennes qui étaient applicables avant le Brexit, tout en permettant au Parlement et au gouvernement britanniques de les modifier ou de les abroger ultérieurement.
L’impact sur le marché intérieur et les relations commerciales
Le Brexit a des conséquences majeures sur les échanges économiques entre le Royaume-Uni et l’UE, puisque ce pays ne fait désormais plus partie du marché intérieur ni de l’union douanière européenne. Les quatre libertés fondamentales (libre circulation des biens, services, capitaux et personnes) ne s’appliquent plus pleinement aux relations entre ces deux entités.
L’accord de retrait laisse place à une période transitoire durant laquelle un nouvel accord commercial doit être négocié. Pour l’instant, les droits de douane et les quotas sont évités grâce à un accord de libre-échange, mais des contrôles douaniers et réglementaires ont été rétablis, entraînant des coûts supplémentaires pour les entreprises et des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement.
Le statut des citoyens britanniques et européens
Le Brexit a également des répercussions sur le statut juridique des citoyens britanniques vivant dans l’UE et des Européens résidant au Royaume-Uni. En vertu de l’accord de retrait, leurs droits acquis en matière de séjour, travail, études et prestations sociales sont protégés jusqu’à la fin de la période transitoire. Par la suite, leur situation dépendra des dispositions législatives ou administratives adoptées par chaque État concerné.
Ainsi, au Royaume-Uni, les citoyens européens doivent demander le Settled Status, qui leur garantit un droit permanent de résidence s’ils justifient d’une présence continue pendant cinq ans. De même, les expatriés britanniques doivent se conformer aux règles nationales de chaque pays de l’UE en matière d’immigration et de séjour.
Les conséquences pour la coopération judiciaire et policière
Enfin, le Brexit a un impact sur la coopération judiciaire et policière entre le Royaume-Uni et l’UE dans les domaines du droit pénal et du droit civil. Le pays n’est plus membre de l’espace Schengen et ne participe plus aux mécanismes européens d’entraide judiciaire et d’échange d’informations, tels que le mandat d’arrêt européen ou le système d’information Schengen (SIS).
Toutefois, l’accord de retrait prévoit des dispositions transitoires pour assurer la continuité de certaines formes de coopération en matière de sécurité et de lutte contre la criminalité, ainsi que la conclusion d’accords bilatéraux ou multilatéraux dans ces domaines.
Le Brexit représente un bouleversement juridique majeur pour le droit européen et pose de nombreux défis aux acteurs concernés. Les implications du retrait du Royaume-Uni sont multiples et touchent à la fois l’ordre juridique interne, les relations commerciales, les droits des citoyens et la coopération judiciaire et policière. Si certaines solutions ont été trouvées pour atténuer les conséquences immédiates du Brexit, il appartient désormais aux négociateurs et aux législateurs des deux côtés de la Manche de construire une nouvelle relation fondée sur l’équilibre entre les intérêts respectifs et les principes fondamentaux du droit européen.
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